Seulement dans des livres, comme vous dites. Seulement! Les livres ne peuvent jamais être seulement ; ils peuvent seulement être toujours.
Jeff Noon

25 sept. 2012

Une de perdue, dix de . . . ouais mais une de perdue.


  C'est l'histoire de Lilia, enlevée à sept ans par son père, et de la longue cavale qui dura toute son adolescence. C'est l'histoire de Christopher, le détective engagé par la mère de Lilia pour la retrouver et de sa fille Michaela, qui rêvait d'être funambule avant de finir dans une boîte minable de Montréal. Michaela sait ce que Lilia a toujours ignoré : la raison de sa cavale. C'est enfin l'histoire d'Eli, étudiant passionné par les langues et la fragilité des sentiments qu'elles servent à exprimer, qui a hébergé Lilia à New York suffisamment longtemps pour tomber amoureux d'elle et partir à sa recherche lorsque, une fois de plus, elle s'enfuit. C'est dans une Montréal hypnotique que se dénouera cette "histoire de fenêtres brisées et de neige", une histoire en forme d'éclats de miroir brisé qui, une fois reconstitué, dessine une vision déchirante du monde.




  Pour une fois, je ne peux que m’incliner devant une quatrième de couv’ aussi bien faite (chose assez rare en ce moment pour le signaler... le fait que la quatrième soit bien faite, vous me suivez jusque là?!). D’ailleurs, elle est tellement bien faite que je pourrais m’arrêter là en finissant par un laconique «c’est un excellent roman». Mais alors vous pourriez vous imaginer que je deviens feignante!


  Toutefois, force m’est de reconnaître que Dernière nuit à Montréal fait partie de ces romans dont il est difficile de parler car il fait partie des romans dont l’ambiance vous enveloppe et vous perturbe sans trop savoir pourquoi, et qui laissent une trace évanescente, l’impression d’y être encore bien longtemps après avoir tourné la dernière page.


  Exactement hypnotique comme l’indique la quatrième de couv’, Dernière nuit à Montréal vous absorbe littéralement dès le premier chapitre.


  «Personne ne reste pour toujours.» Avec cette première phrase, Emily St John Mandel pose le ton de son roman. L’absence et le manque, c’est ce que Lilia, personnage central, laisse derrière elle. Jeune femme étrange collectionnant les mots et les listes, prenant en photos le monde car selon ses propres mots, elle ne fait que le parcourir sans parvenir à s’arrêter pour s’y ancrer. Elle ne sait plus faire autre chose que bouger et alors que tout le monde voit cette suite de voyages comme courageux, elle n’y voit qu’une nécessité. Elle croisera tout au long de sa route une galerie de personnages dont elle servira au final de révélateur à leurs destins contrariés.


  Emily St John Mandel joue ainsi avec les contrastes. Contraste de lieux, car on passe d’un Montréal hivernal aux déserts des Etats-Unis; contraste des personnalités avec le mouvement perpétuel de Lilia, contre l’immobilisme de Michaela, le père recherché pour avoir enlevé sa fille contre celui qui recherche quitte à délaisser la sienne; contraste du temps avec une narration non linéaire.


  Car l’étrangeté de Dernière nuit à Montréal vient également de son absence de chronologie, un peu à l’image du film 21 grammes. Exercice risqué surtout pour un roman en raison de l’absence de repères visuels (barbe ou absence de barbe, coiffure différente...) pouvant indiquer à quel moment du temps on se trouve,  il est pourtant parfaitement maîtrisé d’autant plus que l’auteur ne nous donne aucune date ou lieux à chaque début de chapitre. Mais cela fonctionne et l’ensemble s’enchaîne et se lit avec une fluidité déconcertante.


  Lire Dernière nuit à Montréal devient alors un peu comme reconstituer un puzzle, chaque chapitre étant un morceau de l’histoire de Lilia qui se replace petit à petit pour révéler l’image finale.


 Dernière nuit à Montréal est un roman magnifique car il réussit à nous retenir, à créer cette sensation de voir que la fin de l’histoire approche et de ne pas vouloir y arriver trop vite. Pour un premier roman, Emily St John Mandel place la barre très haut. 



CITRIQ

11 sept. 2012

Catherine is back, and it’s the anonymous Voltés who are very contents!


  Attention, que se passe-t-il lorsque vous réunissez «Grenoble», «signature» et... «Catherine Dufour»?!!


  L’occasion de lustrer votre plus beau dentier et de réviser votre vocabulaire («bonjour» «merci» «j’adore ce que vous faîtes») pour venir rencontrer la responsable de ça :




mais surtout de tout ça :



  

Pour savoir où et quand, c’est que ça se passe.

Les voltés anonymes sont contents! Voire hyper contents!!!



10 sept. 2012

Ceci est mon corps . . . aïeu!!!


  Nicolas revient parmi nous et non, il n’est toujours pas content. Envoyé à Castres où une étrange secte semble faire un usage immodéré du sang humain, il découvre une ville où la foi religieuse est toute en bordel! Nicolas décide donc de faire le ménage. Et ça tombe bien parce que Nicolas aime toujours autant les barbecues.

«...temps et espace vacillent, alors que Nicolas Eymerich se dresse contre les ennemis de l’Ordre et de la Foi.»





  Pour ceux qui auraient oublié et pour les autres, voici déjà un petit rappel des bonnes raisons de découvrir ou redécouvrir la série des Nicolas Eymerich : ici et ici.





  Pour le retour de notre inquisiteur détesté, point de nouvelles bonnes raisons, l’essentiel ayant déjà été dit. L’ambiance moyenâgeuse est toujours aussi bien rendue, l’écriture de Valério Evangelisti toujours aussi fluide et élégante, quant à l’objet, il est encore une fois très beau (Grâce en soit rendue à Corinne Billon, Stéphanie Aparicio et Laure Afchain).




  Avant toute chose, un petit détail d’importance est à signaler. Annoncée comme la troisième aventure de Nicolas Eymerich, il semblerait que ce soit en fait la deuxième, Les Chaînes d’Eymerich se déroulant en 1365 tandis que Le corps et le sang d’Eymerich se passe lui en 1358. D’ailleurs, dans Les Chaînes d’Eymerich, un personnage fait à un moment référence à ce que Nicolas a accompli à Castres. Ce petit imbroglio de dates n’est en soit guère gênant car l’aventure se suit et se comprend encore une fois très bien toute seule. Cependant, il faut reconnaître que lire les aventures dans l’ordre peut apporter un plus au niveau de l’évolution du personnage.


  Construite comme les précédentes aventures, c’est-à-dire en deux points du temps, l’histoire nous démontre encore une fois que le moyen-âge, c’était bien pourri surtout si vous étiez une femme, ou un paysan, ou un pauvre, ou un enfant, ou un non croyant... Quant aux années soixante aux Etats Unis, c’était un peu mieux... sauf si vous étiez une femme, ou un noir, ou un pauvre... mais ça allait quand même vachement mieux!


  En commençant la lecture, ma crainte était que l’intrigue soit trop proche de celle des Chaînes d’Eymerich. Toutefois, l’alchimie a encore fonctionné. L’histoire se met bien en place et on se laisse entraîner. Même si je reconnais que Le corps et le sang d’Eymerich est moins palpitant que les autres aventures, il se lit sans déplaisir.


  Au final, Le corps et le sang d’Eymerich s’aborde comme un épisode légèrement moins fort au sein d’une série conçue avec un talent indéniable.


  L’histoire semble trouver un écho dans Le Mystère de l’inquisiteur Eymerich, car si on lit la quatrième de couv’ de ce dernier, on découvre que l’anémie falciforme, maladie au centre de l’intrigue du corps et du sang d’Eymerich, a ravagé la planète. Mais ceci, nous le saurons dans ... le ...prochain épisôôôôôde!!


  En attendant, comme d’habitude, on ne change pas une équipe qui gagne, comme chacun sait, mieux vaut prévenir que guérir, aucun lien fils unique, en conséquence de quoi, achetez La Volte, La Volte vous le rendra!





CITRIQ

4 sept. 2012

Complètement inutile . . . donc parfaitement indispensable 2

  Vous pensiez être le ou la seul(e) à être né(e) avec deux mains gauches, à faire une attaque cérébrale à la simple vue d'un tournevis et à croire que la clé à six pans est l'incarnation absolue du mal? N'avons-nous pas remercié Mr Ikea et ses manuels délirants où il manque toujours une pièce?! Et bien, rassurez-vous, les super-héros aussi aiment la simplicité et eux aussi ont droit à leur manuel de montage! Un petit malin s'est occupé de leur cas :


Le spécial réalisateur, tout le scénario est dans le manuel.




Le spécial complexe d'Oedipe.



Mais surtout, mon préféré, le spécial... "wibbly wobbly timey wimey"... manuel du Tardis!!!!


Vous en avez rêvé? Ben c'est pas moi qui l'ai fait!

Merci à ActuSF pour les liens.

3 sept. 2012

Rien ne sert de courir, suffit de savoir la fin.





  Kemal, pêcheur d’huitres, possède une main à six doigts et un talent rare : celui de pouvoir détecter quelles huitres donneront les plus belles perles. Retenu prisonnier par l’émir qui souhaite ardemment une prédiction précise sur son futur,  il voit son talent se développer, à tel point qu’il parvient désormais à voir très loin dans le futur. Trop loin. Il ne sert plus à rien à l’émir qui se débarrasse de lui. Rejeté sur les routes, Kemal traversera de multiples contrées où il dévoilera ses prophéties à chacune de ses rencontres. Mais bientôt, ses visions raccourcissent pour petit à petit se rapprocher de sa propre ligne de temps.


  Après le destin de l’humanité dans Cartographie des nuages, le destin toujours mais cette fois à l’échelle de l’individu avec Le Prophète et le Vizir, de Yves et Ada Rémy. Eternel dilemme : le destin existe-t-il et si oui, peut-on le contrarier?


  Lu cet été (Oui je sais! Comment se fait-il que je n’en parle que maintenant? Tout se perd ma brave dame! Mais cet été, c’était les vacances et les vacances, ça sert à vacacionner!), le nouveau libre-objet des éditions Dystopia est comment dire... encore une réussite? C’est un peu convenu certes, n’empêche que c’est vrai!


  Alors attention, je n’irai pas jusqu’à dire qu’on touche au chef-d’oeuvre comme pour le Lisa Tuttle. Mais Le Prophète et le Vizir possède une touche de légèreté parsemée de petites paillettes d’humour second degré dans une histoire somme toute dirons-nous sérieuse, écrite avec beaucoup d’élégance, de finesse et de fluidité, le tout dans un superbe emballage (marque de fabrique des éditions Dystopia). Tout cela en fait un petit texte plein d’évasion dont l’ambiance digne des Milles et Une Nuits vous enveloppe et qui se lit d’une seule traite.


  Oubliez le temps pourri de début septembre, la rentrée des classes, la reprise du boulot, les impôts à payer, lisez Le Prophète et le Vizir car c’est le «livre à voyager» type. Une belle parenthèse à emmener partout car où que vous soyez, c’est lui qui vous emmène ailleurs.




CITRIQ