Seulement dans des livres, comme vous dites. Seulement! Les livres ne peuvent jamais être seulement ; ils peuvent seulement être toujours.
Jeff Noon

21 mars 2012

Catherine adoucit les moeurs.




 Vous êtes pauvres et vous avez vraiment les boules de ne pas pouvoir vous acheter de la bonne SF pas chère. (Sans compter ces crétins qui font passer la TVA à 7)

 Et bien vous n’aurez désormais plus aucune excuse pour ne pas connaître Catherine Dufour. Car rappelons-le pour ceux qui ne nous connaissent pas encore : Catherine Dufour est une déesse, devenons ses prophètes.

 En effet, Ô joie immense! Ô bonheur palpable pour la modique somme de 7,80€! (soit presque la même somme qu’un menu Star Wars chez Quick, testé et approuvé) L’autre chef-d’oeuvre de Catherine, Outrage et Rébellion, vient de sortir en poche chez folio SF avec une magnifique couverture de Aurélien Police (encore une fois remercions les puissances de l’invisible pour avoir effacé Jackie Paternoster avec son photoshop).

 Alors là, je vous sens perdus car vous vous dites : «mais... encore un chef-d’oeuvre de Catherine?!». Eh oui, que voulez-vous? Catherine ne fait que des chefs-d’oeuvre. Ce n’est pas de sa faute, elle a été conçue comme ça. Normal, je vous rappelle que... Catherine Dufour est une déesse, devenons ses prophètes.

 Ok, j’arrête.

 Si Outrage et Rébellion est un chef-d’oeuvre, admettons également qu’il est un peu plus difficile d’accès que L’Accroissement Mathématique du Plaisir.

 Situé dans le même monde que Le Goût de l’Immortalité, c’est-à-dire dans un futur post bordel économique sans nom (oui c’est pour changer un peu du futur post apocalyptique), Outrage et Rébellion raconte l’histoire de Marquis, rebelle et icône involontaire, à travers le témoignage de ceux qui l’ont connu.

 Enfermé dans une pension de luxe, un groupe d’ados se sent si désoeuvré qu’il n’a rien d’autre à faire de ses journées que boire, fumer, se droguer, baiser et faire de la musique (ou du bruit selon la conception de chacun). Mais un évènement (qui pour une fois n’aura rien à voir avec l’apocalypse) propulsera Marquis dans le monde extérieur, et alors... ... alors il ne vous reste plus qu’à lire Outrage et Rébellion pour savoir. Vous  croyez que je vais vous mâcher le travail peut-être?

 Sachez juste que si Outrage et Rébellion est plus difficile d’accès que L’Accroissement Mathématique du Plaisir, c’est notamment en raison de son absence de trame apparente, ce qui en fait également l’un des intérêts du roman. La succession des témoignages (inspirée du livre Please Kill Me) forme 3 parties dont les enchaînements sont comme une grosse claque. D’ailleurs, au final, c’est tout le roman qui vous accroche et vous secoue les neurones car Outrage et Rébellion fait partie de ces textes "ça passe ou ça casse".

 Sachez aussi que Outrage et Rébellion parle de gros mots, d’amour (ou de sexe selon la conception de chacun) mais surtout de musique, de révolte et du rôle de l’art quelque soit sa forme contre la dictature quelque soit sa force.

 Sachez enfin, pour reprendre l’expression de Kiki43, que Outrage et Rébellion est un roman qui mérite sa pastille du triple J, Jubilatoire Juste Jenialissime!


 Pour les moins pauvres ou les collectionneurs/timbrés/amoureux de Catherine, vous pouvez bien sûr encore trouver Outrage et Rébellion chez l’excellente maison d’édition Denoël (Lunes d’encre) dans toutes les bonnes librairies (c’est-à-dire celles où n’existe pas un grand chef débarqué d’on ne sait où pour vous demander si ce rayon SF n’est pas un peu trop grand et si ça intéresse autant de gens que ça).




12 mars 2012

Une automate vaut mieux que deux vibros, tu verras.





Fin du XXIe siècle, Thaïlande, Bangkok.
 Il y a Anderson Lake, venu prendre la direction d’une usine de production de piles d’un genre nouveau, mais qui cherche apparemment à résoudre un mystère autour d’une graine.
 Il y a Hock Seng, secrétaire d’Anderson Lake, mais surtout réfugié de Malaisie qui cherche un moyen de se refaire un avenir prometteur.
 Il y a Jaidee, le tigre de Bangkok et capitaine des chemises blanches, groupe corrompu chargé de contrôler les importations, mais qui voudrait revenir à un système plus stricte.
 Il y a Kanya, seconde de Jaidee et obsédée par une vengeance qui la dépasse.
 Il y a le Somdet Chaopraya, le général Pracha et Akkarat, à la tête des différents ministères mais qui aimeraient bien voir disparaître les autres pour être seul au pouvoir.
 Et il y a Emiko, la fille automate, négligée et maltraitée. Le grain de sable dans cet engrenage en apparence parfaitement huilé.


 Avec La fille automate, Paolo Bacigalupi nous livre un premier roman d’une complexité parfaitement maîtrisée. 

 L’être humain est foutu. Certes, on le savait déjà! Mais Paolo Bacigalupi enfonce le clou. Dans ce monde de demain où à force d’avoir joué avec la génétique, on finit par se demander quelle sera la prochaine épidémie à faire le ménage parmi l’humanité, le pouvoir repose sur la capacité à nourrir la population et à procurer de l’énergie. Bref, les riches sont riches et les pauvres ont faim et triment comme des cons. 

 Donc comme ça, a priori, vous vous dites : «rien de nouveau sous le soleil de la SF». Soit, sauf que la manière dont Paolo Bacigalupi s’approprie ces thèmes récurrents est particulièrement intelligente. Avec sa description de Bangkok notamment, cité foisonnante et menacée par les eaux. A ce propos, il faut signaler que la couverture française ne rend pas hommage à cette ambiance urbaine étouffante contrairement à celle d’origine.


 Il n’y a aucune surenchère. L’auteur ne nous assomme pas de trouvailles futuristes complètement inutiles. Il pose simplement son décor pour nous amener vers le meilleur.

 Car le talent de Paolo Bacigalupi (en plus d’avoir un nom mémorable) et la réussite de La fille automate est d’avoir tissé cet écheveau d’intrigues et de complots où aucun personnage n’est ce qu’il paraît au début. Aucun sauf Emiko qui reste la clef de voute du roman. Si Rome ne s’est pas faite en un jour, les bouleversements, eux, résultent souvent d’un tout petit désordre aussi infime soit-il.

 S’il faut bien 150 pages pour installer les personnages (et cela lassera peut-être certains, sans compter toutes les expressions et noms thaïs avec lesquels il faut se familiariser), cela vaut largement l’effort demandé. Les mots de Bacigalupi ont de la texture, ses personnages de la profondeur.  Il y a quelque chose de Miéville chez lui dans sa vision réaliste de l’humanité. Il n’y a pas de héros, juste des gens qui sont là au moment x et qui doivent faire avec.

 Excellent roman, La fille automate mérite donc son prix Nébula et Paolo Bacigalupi, toute notre attention pour la suite des évènements.



Matin, midi, soir . . . et le reste du temps.

 Ils sont six (qui multiplié par sept donne 42 mais... aucun lien), ils sont islandais, je les ai découverts hier et je les adore!



WeWereMonkeys : Of Monsters and Men - Little Talks from WeWereMonkeys on Vimeo.