Seulement dans des livres, comme vous dites. Seulement! Les livres ne peuvent jamais être seulement ; ils peuvent seulement être toujours.
Jeff Noon

1 mai 2018

Manue, le retour.


   Quand nous avons appris que toi, Manue, la seule, l’unique, revenais au boulot, il faut bien reconnaître que nous étions contentes




voire très contentes.




  Bon c’est vrai, on aurait pu se la jouer sobrement



Mais la sobriété ce n’est pas notre truc.





  Passé ce premier moment d’intense émotion, il a bien fallu préparer ton retour. Eh oui ! 

  Avant toute chose, ne t’étonne pas de ne pas reconnaître ton espace de travail. Nous-même avons eu du mal à nous y faire. Mais le truc noir et plat en face du clavier, c’est bien l’écran de l’ordinateur, n’aies pas peur.




  C’est juste parce qu’on a dû retirer toooooooouuuuuuuuuuuuuus les post it que tu y collais.






Pour être sûres de ne rien oublier, on s’est fait une check list :


1/ Connaissant ton addiction au post it, penser à en commander 3 palettes, histoire de se donner jusqu’à une semaine pour voir venir et que tu ne te sentes pas trop démunie.





2/ Penser également à commander des bacs pour tes étirements, des roses bonbons avec inscrit dessus « I’m a poor lonesome cowgirl » parce que tu es la seule personne de notre connaissance à pouvoir se rouler une clope ET marcher comme un cow boy, tout en restant féminine ET sexy.




3/ Toujours pour tes étirements, faire repeindre certains murs avec silhouette « s’appuyer ici » pour que tu puisse faire ton yoga ET échanger avec tes collègues, tranquillement.





4/ Retirer tous les calendriers et horloges puisque ça ne sert plus à rien vu qu’on peut demander à google quel jour on est et quelle heure est-il.


5/ Après négociations avec google justement, ils ont revu leur système d’acceptation de mots clefs pour prendre en compte la méthode Manue : « livre avec une couverture rouge qui parle d’un oiseau qui emmène un poisson partout ailleurs sauf ici et dont l’auteur est peut-être français quoique, peut-être une femme voire un collectif et qui est paru à un moment donné de l’histoire de l’imprimerie et dont françois busnel en a carrément rien à secouer ».
Il semblerait que ta méthode fasse des émules.




6/ Faire installer une trappe d’évacuation pour les clients t’annonçant qu’ils vont commander sur amazon, ta patience quant à l’éducation des masses allant de ça




à ça





et dans quelques rares cas, pouvant atteindre ça



Soyons donc prudentes.



7/ Faire imprimer pour moi un tee shirt « alexpedia universalis, propriété exclusive de Manue, défense d’utiliser sans le consentement de la propriétaire ». Mais n’oublie pas Manue, moi aussi parfois…




8/ Toujours pour moi, penser également à faire des étirements préparatoires pour être prête à réentendre alors que je suis sur le point de quitter ton rayon : « Ah Alex attends… », afin d’éviter toute luxation, tours de reins ou autres en me retournant 4 fois de suite. 
Je me suis bien entraînée




jusqu’à réussir le demi tour parfait




9/ Commencer à retravailler nos blagues à deux balles et autres jeux de mots parce qu’avec toi, on sait que c’est toujours en deux fois. « Attends refais là moi j’étais pas concentrée »



Ce message était intégralement destiné aux yeux avertis de Manue,et composé par Amélittérature et Mélicerte 42.



17 oct. 2017

"La beauté me semble de tout recréer."

 À l’origine fut la vitesse, le pur mouvement furtif, le « vent-foudre ». 
 Puis le cosmos décéléra, prit consistance et forme, jusqu’aux lenteurs habitables, jusqu’au vivant, jusqu’à vous. 
 Bienvenue à toi, lent homme lié, poussif tresseur des vitesses.


 Si cette citation vous parle, c’est que vous faites partie de ces conquis, ces irréductibles pour qui La Horde du contrevent est sans doute devenu culte.
 Si cette citation ne vous parle pas, sachez qu’il s’agit des premières lignes d’un roman (si comme mon double vous aimez faire sérieux vous pouvez dire l'incipit), devenu culte donc.



 Adapter un roman (au cinéma, au théâtre ou en BD) est déjà un exercice difficile. Un peu comme une première rencontre avec la belle famille. Adapter un roman culte c’est encore pire. C’est la première rencontre avec la belle famille blanche et bigote en étant noire, juive, homosexuelle (femme donc), végétarienne ET fan de sf. Va falloir s’accrocher pour lutter contre les préjugés !


 Eric Henninot s’est donc lancé ce défi là. Et je dois reconnaître qu’il le relève plutôt bien dans ce premier tome.

 Si quelquefois on peut avoir comme une grande idée, celle de cette BD est sans doute d’inclure une préface de Alain Damasio qui explique son point de vue quant à l’histoire de cette adaptation mais surtout, met en mots une idée essentielle :

« De toute façon, on ne juge pas la valeur d’une adaptation à sa fidélité au support original ; on la juge à la qualité de sa trahison. »


 En abordant La Horde de Eric Henninot, je ne me suis pas dit que je lisais la Horde en BD. Je lisais une BD d’aventure et d’imaginaire…qui m’a rappelé un roman que j’avais lu. Alors oui, pour ce premier tome la trahison me semble de qualité. J’ai apprécié la cohérence de ses partis pris, sa vision des paysages, ses plans larges, son interprétation du vent.



 Sa mise en scène est classique, peut être trop, et trop sage à mon goût. Je ne suis pas fan des visages, son dessin n’est pas celui qui m’interpelle. Et pourtant, cela fonctionne quand même, cela a fonctionné sur moi. Il s’est passé quelque chose. L’histoire se tient, on voit qu’il a aimé le roman et c’est ce qui me plaît le plus. J'ai retrouvé l'esprit de la Horde.


 « Nous sommes dans la Horde d’Eric. Pas la vôtre ! Pas la mienne ! » rappelle Alain. C’est on ne peut plus vrai. Mon Oroshi n’est pas comme cela, mon Caracole non plus, mon Sov encore moins, aucun personnage ne ressemble de près ou de loin aux miens (à l’exception peut être de Pietro). Ma Horde n’est pas celle d’Eric. Elle est toujours mienne. Ma Horde dans Ma tête. Comme l’est toujours mon Seigneur des anneaux ou mon Guide du Routard Galactique. Et cela ne m’a pas empêchée d’apprécier celle d’Eric.


 Rendre une oeuvre intouchable, c’est la laisser se dessécher, se figer, c’est la laisser s’éteindre. Les adaptations, réussies ou non, sont autant de dépoussiérage, d’énergie pure qui réveille l’oeuvre et la fait revivre. Que ceux qui ne connaissent pas la Horde n’oublient pas d’être curieux et après avoir lu cette BD, découvrent l’oeuvre originale. Pour les sceptiques, allez-y, rien ne peut contrecarrer la force de votre propre imagination si vous y croyez suffisamment. Vous aimerez ou non, vous serez d’accord ou non, vous serez tentés par la suite ou non. Et pour ceux qui pensent vraiment que la Horde est intouchable et qui veulent la mettre dans un carcan, souvenez-vous de ces mots :

« N’acceptez pas que l’on fixe ni qui vous êtes ni où rester. »


 Bienvenue à toi Eric et à vous, petite nouvelle ou petit nouveau qui mettez un pied dans cet univers, dans notre Horde de voltés, constituée de toutes ces micros hordes.


 Quant à moi, je m’en vais relire un bouquin qu’il y a 12 ans, un certain Mathias mit entre mes mains et que je mis ensuite entre celles de Kiki, d’Amélie, de Fatima, de Myriam, de Blandine et de tant d’autres qui le mirent à leur tour entre les mains de tant d’autres qui à leur tour etc… etc… etc…


4 janv. 2017

La bonne année ma brave dame !!

  Parce que, même si on ne sait pas si ça fait du bien, en tout cas ça ne peut pas faire de mal, souhaitons nous la bonne année... ainsi donc :


Une bonne et excellente année à tous ! Avec le pack habituel de toutes les bonnes choses à vivre ! 


Mais avez-vous remarqué cette manie qu'on a tous chaque début d’année de prendre de bonnes résolutions ?


Comme pour commencer, un bon régime



ou encore, se remettre au sport…



et rester zen en toutes circonstances.



Mais, assez bizarrement, on ne les tient jamais ces bonnes résolutions !




   Du coup, pourquoi ne pas être plus réaliste ? Alors voici les nouvelles bonnes résolutions :

1/ Penser à se couvrir



parce qu’on ne sait jamais, un accident est vite arrivé.




2/ Expliquer les choses calmement...



...et simplement



3/ Ne pas laisser le ménage en souffrance





4/ Bien préparer son plan d’action




5/ Soigner son style...



…ou pas…



mais bon c’est quand même mieux avec, non ?



6/ Reprendre un bon rythme de lecture, sans stress…



7/ mais surtout, savoir trouver les bons arguments pour convaincre le client et emporter la donne



8/ toujours avoir confiance en ses capacités sans se surestimer bien entendu



9/ Travailler son côté hypocrite …euh...diplomate...



10/ Arrêter de s'exciter avec ces foutus prix littéraires ! Y a une vie après le Goncourt... mmmmmmerde!!!




Et bien sûr, encore et toujours, garder la pêche ! Rester souriant !



Et ne jamais oublier ceux qui ont rejoint la Force…



Bonne année 2017 !!

26 août 2016

Quand je me prends pour Léo Henry.

  Pour fêter les dix ans de la bonne idée de leur création, les éditions Gallmeister ont lancé un concours de nouvelle. Il fallait écrire une nouvelle donc, cohérente, et en y incluant un maximum de titres du catalogue, le tout étant compris entre 3000 et 5000 signes. C’est rigolo comme jeu, non ?

  Alors moi aussi j’ai voulu jouer à Léo Henry, le spécialiste de la nouvelle sous contrainte (j’en profite pour vous encourager à vous inscrire sur son site, ICI, afin de recevoir chaque mois une nouvelle par mail).


  Bon j’ai pas gagné, ce sont des choses qui arrivent mais c’est pas grave. Alors je partage et j’en profite pour dire que cette petite chose sortie de mon cerveau et torturée dans tous les sens pour que ça rentre dans les 5000 signes, est dédiée à Manue, ma sympathique fée de la bière à moi.






 Au lac des bois, assise sur son rocher comme la grenouille sur son nénuphar, Birdy, la fée des Grandes Idées déprimait. Entendant sa déprime résonner au-delà du monde connu et inconnu, la sympathique fée de la bière surgit.
- Ah…quand même, constata-t-elle.
- Je suis malheureuse, annonça Birdy.
- J’aurais pas deviné toute seule.
- Elle est partie et ça fait un creux. Un creux plein de vide avec beaucoup de rien qui l’entoure. Et c’est comme si elle avait arraché un peu de moi en partant, des lambeaux de moi et ça fait mal.
- C’est beau ce que tu dis, répondit la sympathique fée de la bière sans trop y croire. Du coup, tu restes sur ton rocher pour vingt cinq ans de solitude ou tu comptes à un moment faire autre chose qu’avoir mal ?
 Birdy retint un gros sanglot comme un enfant sans doudou.
- Du vide et de la corrosion qui creuse…
- Ok ! s’exclama la sympathique fée de la bière. Je sais ce qu’il te faut. Un voyage initiatique ! C’est ce que font les déprimés. Ça ou se raser le crâne et partir chanter sur les routes de Katmandou avec des chèvres du Larzac.
- Un voyage ?
- Oui et je sais exactement quoi et où. Dans la contrée indienne, à Indian Creek précisément, là où les rivières se séparent, tu trouveras le saloon des derniers mots doux. Là bas les truites…
- Sérieux ? J’ai mal à mon vide et tu me parles de mots doux ?
- Cesse de jouer les oiseaux de malheur et écoute. Tu feras des rencontres avec l’archidruide, Joe. Il te montrera l’itinéraire d’un pêcheur à la mouche mais surtout, l’art du Shibumi.
- Shifumi.
- Non, Shibumi. Tu verras.

 C’est ainsi que, oubliant le petit déjeuner des champions pourtant réglementaire en de telles circonstances, la sympathique et non moins déprimée fée des Grandes Idées prit la route, en promettant de la remettre à sa place en fin de mission. Trouver l’archidruide fut une mince affaire car à vol d’oiseau et même sans l’âge du capitaine, ce n’était pas si loin. Elle ne traversa pas enfer et désolations, tourna à droite après la montagne en sucre, évita les derniers grizzlis qui par mesure de précaution voyageaient à deux plutôt qu’en animaux solitaires, rata la dernière séance à laquelle elle ne comptait pas aller et parvint à destination avant la nuit.

 L’archidruide était affalé contre le bar du saloon, caché derrière un journal clamant : « Incident à Twenty-Mile : le gang de la clef à molette passe Frank Sinatra dans un mixeur et trouve le testament d’un pêcheur à la mouche ! »

Lorsque le journal se baissa, Birdy fut surprise de constater que Joe n’était ni tout à fait un homme, ni tout à fait une femme, sans prendre pour autant des deux mais ressemblait étrangement à la sympathique fée de la bière, avec une barbe et des pieds en peau d’ours.
- Souvenirs de mes années grizzly.

- Il paraît que tu connais le Shibumi.
- Le quoi ?
- La fée de la bière a dit…
- Ah ouais ! la coupa Joe. Mais non. Moi je peux t’offrir une bière et disserter sur la danse avec les truites. Pour le reste, il vaut mieux voir l’indien blanc.
 Birdy accepta la bière parce qu’elle avait soif et la dissertation parce qu’elle n’avait pas le choix puis s’enquit du moyen de trouver ledit indien.
- Alaska.
- Le pays ?!
- L’Alaska n’est pas un pays et en l’occurence, c’est un bar. Et méfie-toi. Si l’indien te demande de classer les sortilèges de l’ouest par ordre alphabétique de grandeur, c’est qu’il est cuit. Faudra revenir dans un jour ou deux.

 Elle trouva le bar et l’indien qui, étrangement, ressemblait à la fée de la bière, avec des plumes et un parfum de jitterbug lisant un journal annonçant : « Miracle à Santa Anna : trouvez la délivrance dans la vente d’aquarium ».
- Est-ce que je rêve?
- Qui sait ? répondit l’indien.
- Bon alors, ce Shibumi ?
- Toi retrouver le livre de Yaak et moi te montrer Shibumi.
- Pourquoi tu parles comme ça ?
- Histoire de faire couleur locale.
- Ok. Il est où ton bouquin ?
- C’est l’expert qui l’a. Sur la colline des potences il y a un bar, la dernière frontière.
 Birdy soupira.
- Une petite bière ?

 Elle accepta puis trouva l’expert qui après lui avoir offert à boire, promit le livre en échange de l’oiseau du bon dieu possédé par Cassandra, sise dans le jardin des martyrs nord américains, laquelle, après une bière, exigea le nom des étoiles que les arpenteurs, molosses de flammes et d’argile, avaient pris pour offrir aux douze tribus d’Hattie en gage de respect, lesquelles logeaient au refuge de Sukkwan Island un bar à thème, où là, l’homme qui marchait sur la lune, un fou ordinaire, après une bière, lui donna le petit traité de philosophie naturelle, ouvrage mystérieux dont la couverture mentionnait « Pas de panique ! » ce qui lui rappela vaguement quelque chose. Elle accepta les bières puis retourna récupérer ce qui devait l’être et retrouva l’indien/fée de la bière.

- Bon alors ! Pourquoi tu me trimballes ?
- Tu vois, si ton coeur doit être un désert solitaire, je serai toujours là pour le peupler un peu et jouer au Shibumi.
- Mais c’est quoi à la fin ?
- C’est comme le shifumi mais avec un b comme bière !